Jacques Cœur (1395-1456), grand argentier du roi Charles VII
Jacques Cœur est le fils d’un pelletier fournisseur de la cour du duc de Berry à Bourges.
Il naît dans une période tourmentée, pendant la guerre de Cent Ans qui divise profondément le pays. Dévoué au « roi de Bourges », il côtoie Jeanne d’Arc, est le confident d’Agnès Sorel, la maîtresse du roi.
Le début du XVème siècle est une période de basculement entre le Moyen-Age et la Renaissance. Homme d’affaires et banquier, Jacques Cœur contribue à construire un nouvel avenir pour la France en favorisant les échanges, notamment avec l’Italie et l’Orient.
« L’empire » commercial de Jacques Cœur ne lui survit pas, mais les monopoles royaux qu’il a installés profitent à l’Etat. Il a grandement contribué à la remise en ordre financière et monétaire du royaume. Grâce à ses prêts d’argent et à la fourniture d’armes, il permet au roi de France d’entretenir des armées permanentes qui reprennent la Normandie puis la Guyenne aux Anglais.
Le Palais Jacques Cœur, est « le seul de ses rêves à lui avoir survécu », a écrit l’historien Jean Favière.
Jacques Coeur naît à Bourges en 1395. Sa famille, originaire de l’Allier, s’est installée à Bourges pour faire prospérer ses affaires commerciales.
Son père fournit le duc Jean de Berry en fourrure. Quand le dauphin, futur Charles VII, s’installe à Bourges en 1418, la bourgeoisie berrichonne voit s’ouvrir des postes dans son entourage.
Jacques Coeur épouse Macée de Léodepart, petite fille du maître de la Monnaie, et entre dans cette compagnie en 1429. Il spécule sur la quantité de métal précieux contenu dans les pièces qu’il fabrique, ce qui lui vaut une condamnation, suivie d’une grâce royale.
Au début des années 1430, il devient fournisseur de la cour, qu’il approvisionne en produits du Levant. Son voyage vers l’Orient en 1432 se serait terminé par un échec.
Photo Vitrail de la salle des galées du palais Jacques Coeur à Bourges. DADP18, François Lauginie
En 1439, il occupe la charge d’Argentier qu’il conserve jusqu’à sa chute en 1453 et qui assure une grande partie de sa fortune. Son rôle consiste à assurer les dépenses quotidiennes du souverain, ce qui le conduit à consentir des avances au trésor et à contrôler les circuits d’approvisionnement de la cour. Pour cette clientèle, Jacques Cœur dispose d’un certain nombre de magasins d’étoffes, de bijoux, de meubles, de fourrures.
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A partir de 1440, Jacques Cœur devient commissaire du roi auprès des Etats du Languedoc. Il est appelé à négocier le montant des impôts de la province et en tire un bénéfice personnel. Anobli en 1441, il entre au conseil royal. Jacques Cœur participe à la reconquête en finançant l’effort de guerre. Profitant de l’envergure de ses affaires, il joue un rôle diplomatique à Gênes, en Aragon, à Rome, jusqu’en Egypte. Capitaine de nombreuses places fortes, visiteur général des gabelles, il propulse son fils à l’archevêché de Bourges en 1450. Cette ascension suscite de nombreuses jalousies parmi ses collègues marchands, à Tours ou à Montpellier, et parmi la noblesse de cour, qui lui doit beaucoup d’argent
Jacques Cœur est arrêté le 31 juillet 1451 au château de Taillebourg sur la foi d’accusations rassemblées en toute hâte. Au château de Lusignan, le 29 mai 1453, après un an et demi de procès, la sentence tombe : Jacques Cœur est coupable. Ses biens sont confisqués et mis en liquidation.
Au cours de son procès, Jacques Cœur doit répondre d’un meurtre et de crimes de lèse-majesté.
Jacques Cœur est soupçonné d’avoir empoisonné Agnès Sorel, la favorite du roi Charles VII. Il a pourtant été l’un de ses proches et son exécuteur testamentaire. Il est innocenté par le médecin. Mais en 2005, les restes du cadavre d’Agnès Sorel sont analysés et montrent une très forte concentration de mercure : remède médical mal dosé ou poison, le mystère demeure.
Jacques Cœur est accusé d’avoir manqué de fidélité au roi et d’avoir directement remis en cause son autorité et son honneur. Il a usurpé l’identité du souverain en imitant sa signature et son sceau. Il a émis de la fausse monnaie quand il était chargé de l’atelier de Bourges en 1429 et 1430. Il a escroqué deux gentilshommes chargés d’arranger le mariage de la fille de Charles VII avec le duc de Bourbon. Surtout, il a lésé les intérêts du royaume à l’étranger. Il a exporté au Levant des lingots d’argent frappés de la fleur de lys dont il a trafiqué la teneur en métal précieux ; il a vendu des armes aux Sarrasins malgré la menace qu’ils font peser sur Constantinople ; il a refusé de protéger un jeune esclave converti au christianisme pour ne pas nuire à ses intérêts commerciaux.
Il n’échappe à la peine de mort qu’en reconnaissance des services rendus à la couronne et surtout à l’intervention du pape Nicolas V.
Depuis sa geôle de Poitiers, il s’évade le 27 octobre 1454.
Au début du mois de mars 1455, Jacques Cœur est à Rome. Depuis Marseille, il récupère, hors de portée de la juridiction du roi, une part importante de ses actifs commerciaux en Méditerranée, dont ses quatre galées. Le pape Nicolas V lui assure sa protection. Pourquoi le pape protège-il ce fugitif français au risque de froisser Charles VII. un des plus puissants souverains d’Europe ?
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Entre 1446 et 1449, fort de la confiance de Charles VII en ses talents de négociateur, Jacques Cœur a mené plusieurs missions diplomatiques.
Il s’initie aux affaires italiennes en traitant avec la république de Gênes, puis dirige une ambassade à Rome en 1448 afin de mettre fin à un nouveau schisme. Il contribue à l’abdication en Savoie de l’antipape Félix V en faveur du souverain pontife de Rome Nicolas V. Ce dernier ne cesse dès lors de témoigner à l’Argentier du roi de France sa reconnaissance et son amitié. Jacques Cœur perd son protecteur quelques semaines après son arrivée à Rome.
Après la mort de Nicolas V, le nouveau pape Calixte III reprend l’idée de ses prédécesseurs de lancer une croisade contre les Turcs qui se sont emparés de Constantinople deux ans plus tôt.
Jacques Cœur met ses talents de diplomate et de financier au service du Saint-Siège pour préparer l’expédition et embarque avec la flotte qui quitte Ostie le 23 septembre 1455. La trentaine de navires rassemblés ne font que sécuriser temporairement les îles de la mer Egée, et c’est sur celle de Chio que s’éteint Jacques Cœur le 25 novembre 1456.
Devises imagées et armes parlantes sont à la mode au XVe siècle. Jacques Cœur, récemment anobli, semble s’inspirer à ce titre des usages d’illustres personnages comme le duc Jean de Berry. Mais, il va plus loin en déclinant devise, cœurs et coquilles Saint-Jacques de manière quasi systématique, depuis le monogramme associé à sa signature jusqu’aux ornements de son palais de Bourges.
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L’usage de son nom et de sa figure ne disparaît pas avec lui et s’amplifie alors que se forge sa légende. En 1939, dans un contexte de mobilisation patriotique, les grandes figures de l’histoire nationale sont représentées dans une nouvelle série de billets édités par la Banque de France. Après Sully ou Bayard, Jacques Cœur et son palais de Bourges sont choisis pour illustrer le nouveau billet de 50 francs mis en circulation en janvier 1941. La Résistance pastiche alors avec humour le billet afin de dénoncer l’Occupation allemande et la collaboration du régime de Vichy.
De nos jours, centre hospitalier, lycée, entreprises commerciales portent son nom à Bourges, Lyon et Montpellier
Partez à la découverte de Jacques Coeur en visitant le Palais Jacques Coeur
Découvrez de manière onirique la vie de Jacques Coeur sur la façade du Palais Jacques Coeur à travers les Nuits Lumière de Bourges chaque soir en été